Poutine et l'autoritarisme mondiale
- N.K.
- 18 juil. 2018
- 3 min de lecture
« Si Poutine n’existait pas, les médias occidentaux l’inventeraient », disait Éric Zemmour à l’antenne de RTL. Mais alors que le président russe

exalte fièrement son torse nu tout en ordonnant le rattachement de la Crimée et en soutenant assidument le régime syrien, une question vaut le coup d’être soulevée. Le président Poutine est-il, comme l’affirment les médias occidentaux, un dictateur d’un autre temps, tout droit échapper de l’époque soviétique ou l’instigateur d’un régime totalitaire d’un nouveau genre ?
Pour répondre à cette question, nous devons comprendre qu’il existe aujourd’hui quatre types de régimes totalitaires, les régimes patrimonialistes traditionnels, incluant les traditionnelles monarchies absolues, les régimes césaristes et bonapartistes, où un homme prend le pouvoir à vie, les régimes populistes qui utilisent l’exaltation du pouvoir populaire afin de se maintenir en place, et enfin, peut-être les plus tristement célèbres, les régimes totalitaires, le fascisme, le nazisme et le stalinisme.

Chefs des principaux régimes totalitaires en Europe (Hitler, Staline et Mussolini)
Si l’on regarde la majorité des régimes dis quasi-dictatoriaux de nos jours, on peut s’apercevoir qu’ils ne sont globalement pas monarchiques, qu’ils ne sont pas non plus bonapartistes puisque n’utilisent pas de titre particulier et qu’ils ne se basent pas non plus sur une idéologie forte comme les régimes totalitaires. Resterait donc le populisme ? Il est vrai que la majorité de ces régimes se basent sur une démocratie contrôlée et encadrée pour survivre.

Cependant, si ces régimes ont tendance à s’appuyer sur les populations pour construire leur autoritarisme, il est sûr que la guerre civile en Syrie et le printemps arabe de 2011 montre bien un rejet de l’autoritarisme par les populations, remettant en cause le populisme.
Et si en réalité Poutine, tout comme Xi Jinping en Chine ou Sisi en Egypte avaient inventé une nouvelle façon de gouverner. C’est ce qu’a imaginer dans les années 80 le sociologue français Gérard Mermet, qui à inventer le néologisme « democrature ». Selon lui, cela désignerait les pays, de la Russie au Venezuela qui maintiennent des structures démocratiques tout en exerçant un pouvoir d’une extrême verticalité.

Mais ces pouvoirs qui ne laissent à la démocratie qu’une place figurative ne sont pas les seuls à vouloir renouer avec un autoritarisme pragmatique. D’après Pierre Rosanvallon, un autre type de gouvernement aurait vu le jour récemment, ce sont les démocraties illibérales. Ces régimes, à l’origine démocratiques, se basent sur l’exaspération de leur population d’un libéralisme poussé à l’extrême, c’est le cas par exemple du Consulat en France, régime pré-bonapartiste, qui est arrivé au pouvoir en promettant la fin des troubles de la Révolution. Les démocraties illibérales actuelles, notamment la Hongrie et la Pologne, le sont devenue en réaction directe au libéralisme européen. Loin d’être un tabou, ces régimes sont reconnus comme tels, y compris par leurs dirigeants. Victor Orban, président actuel de la Hongrie, écrivait en 2010: « un État illibéral (...) ne nie pas les valeurs fondamentales du libéralisme comme la liberté (...) mais il ne fait pas de l’idéologie un élément central de l’organisation de l’Etat. [Il faut] comprendre des systèmes qui ne sont pas occidentaux, qui ne sont pas libéraux, qui ne sont pas des démocraties libérales, peut-être même pas des démocraties. Et qui pourtant font le succès de certaines nations. ». Outre les critiques de l’Union Européenne, le muselage des ONG, l’encensement des régimes autoritaires et la justification par la voie des urnes, les régimes illibéraux s’appuient principalement sur la critique d’un libéralisme décadent, comme par exemple avec le milliardaire d’origine hongroise George Soros prie pour cible par Orban.

Victor Orban en Hongrie
Cependant, quelques soit le régime, ces retours dangereux aux autoritarismes témoignent d’une volonté des peuples de renouer avec un passé glorieux, que ce soit Catherine et les Tsar en Russie ou le monde bipolaire de la guerre froide pour Trump, avec une phrase qui pourrait être aujourd’hui clamé par beaucoup de pays: « Make (insérer pays) great again ». Preuve que plus que jamais, histoire et politique sont plus que liés.
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